Quelques Éléments de Réflexion

Problématique de la Croissance
Tout le monde recherche de la croissance. C’est le moteur du capitalisme mais aussi de la social démocratie qui cherche à redistribuer (à long terme, on ne peut redistribuer que ce qui a été produit).
La croissance se heurte au mur des ressources naturelles (même si les prévisions pessimistes du Club de Rome ont été infirmées). On ne pourra pas faire en sorte que chaque famille Chinoise ou Indienne ait sa voiture particulière. Le développement durable implique une autre forme de croissance.
Les indicateurs de croissance ne sont pas que le PIB/habitant mais aussi la durée de vie en bonne santé, la qualité de la vie, le niveau d’éducation, l’amélioration démocratique, …
Il ne faut pas oublier que le développement durable repose sur 2 piliers : écologique mais aussi social.
Ceci implique :
– des comportements différents (dans 25 ans, il sera peut-être aussi incongru d’utiliser une voiture particulière que fumer une cigarette l’est aujourd’hui).
– une valorisation différente. Un fort développement du culturel et de l’immatériel entraînera un bouleversement dans les dépenses des ménages
En outre, les hommes deviendront producteurs et pas seulement consommateurs : les adolescents passent plus de temps sur Internet que face à la Télévision. En outre, ils passent beaucoup de temps à « chatter » (donc à produire plutôt qu’à consommer).
Des sociologues ont analysé le comportement de populations isolées du Groenland dans les années 50. Ces personnes qui avaient très peu de ressources alimentaires, passaient chaque matin 2 ou 3 heures à rendre visite à leurs voisins pour échanger, pour raconter des
histoires, … avant d’aller pêcher ou chasser.
Une certaine forme d’ «abondance frugale » (JB de Foucauld) est à mettre en place.
Ceci pourrait entraîner la fin de l’illusion monétaire.
Sans aller à considérer les embouteillages d’automobiles qui créent du PIB, on peut prendre l’alternative suivante :
– je rentre à 18 heures chez moi pour préparer un repas que je partage avec des amis
– je travaille jusqu’à 20h et j’invite mes amis au restaurant
En termes de PIB et de création d’emplois, la seconde proposition est supérieure. Conduit-elle à un plus grand bonheur ?
Comment créer une protection sociale de haut niveau en détruisant les illusions monétaires et en pratiquant l’abondance frugale ?
Quelles conséquences sur les « industries culturelles » ? voire les technologies mentales (Vivenet) ?

Qui décide de ce qui a de la valeur ?
On parle de compétitivité des pays, de R&D, d’innovation, …
Il faut remarquer historiquement le leadership Américain sur le mode de civilisation donc sur ce qui a de la valeur. On peut noter que le capitalisme se développe car il génère de la frustration et de l’envie (cf la tendance actuelle à l’hyperluxe pour arriver à faire dépenser leur argent aux financiers, aux avocats, … les plus riches ou comment dépenser 5 à 10 M€ par an ?).
Historiquement, on observe plusieurs vagues de produits ou services à haute valeur ajoutée :
– automobile et chemin de fer
– électroménager
– industrie pharmaceutique
– armement/défense
– culture
– Internet
– finance exotique ou manipulation de signes (avocats, consultants, communicants)
– ?
Souvent ces industries ont connu des bulles et généré des crises. Le processus est souvent identique : une industrie ou un service naît . Les premiers entrants gagnent beaucoup d’argent. D’autres dupliquent le modèle, la rentabilité baisse donc il faut prendre plus de risques pour avoir une forte rentabilité et la crise survient.
Il faut se demander pour ces diverses étapes qui a extrait de la valeur, qui a éventuellement perdu (si le jeu n’est pas à somme nulle) : les actionnaires, les consommateurs, les avocats/consultants, les salariés, les intermédiaires, …
A l’opposé, le développement de l’économie sociale et solidaire peut recevoir des succès d’estime ou médiatiques (cf le Prix Nobel attribué au fondateur de la Grameen Bank. Il a reçu le prix Nobel de la Paix et non celui d’économie alors que celui-ci a été attribué à des personnes ayant développé des modèles boursiers dont l’utilité peut être questionnée) mais ce secteur est souvent marginalisé (image, attention de l’Etat voire financièrement).

Les vrais critères de compétitivité d’un pays
Il faudra interroger sur les critères de compétitivité d’un pays. Comme le reprochent certains rapports internationaux, est-il plus facile de faire des affaires aux Bahamas ou à la Jamaïque qu’en France ?
Faut-il considérer :
– la productivité des meilleurs (et déclarer les autres inaptes au travail) ?
– la productivité des plus faibles ?
– la minimisation des dépenses sociales et de solidarité pour un niveau de protection sociale donnée ?
– l’égalité de traitement entre les personnes ?

Des marges de manœuvres importantes existent en France pour décroître le poids de la sphère sociale tout en maintenant un haut niveau de satisfaction :
– l’APL représente 13 milliards €. Une politique intelligente du logement permettrait de réduire fortement ce chiffre
– le coût du chômage et de la formation continue sont très élevés : plusieurs dizaines de milliards €. Comment optimiser l’efficacité de ces dépenses ?
A l’opposé, le vieillissement de la population entraînera une croissance des dépenses de santé.

Quelle volonté de réduire la pauvreté en France et dans le Monde ?
L’abondance frugale, le développement durable et une bonne gestion économique et sociale impliquent que la réduction de la pauvreté soit un objectif majeur.
La croissance dans les PVD n’est pas un gage fort de développement à cause des intermédiaires ou des donneurs d’ordre des pays développés qui engrangent des surprofits.
Cet objectif a un volet économique mais aussi politique (gouvernance).
Il implique aussi une croissance plus auto-centrée qu’essentiellement d’exportation (cf le développement du Japon).

Conclusion
L’alternative n’est pas « s’adapter à la mondialisation ou mourir ».
Le problème n’est que partiellement économique, il est surtout politique. Les mots changement, réforme, rupture, … sont galvaudés et masquent soit des rapports de force politico-économiques soit l’incapacité des politiques à créer de nouveaux paradigmes, voire de nouvelles utopies.
Les travaux du Cercle doivent donc se concentrer sur les vrais leviers et les questions fondamentales plutôt que sur des conséquences (évolution de l’âge de la retraite par exemple).

Michel CABIROL
Mars 08

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