Les tragiques attentats terroristes de New-York et Washington le 11 septembre, les évènements qui les ont suivi, en particulier le combat lancé contre la mouvance Al Quaïda d’Oussama Ben Laden, l’actuelle tentative de (re)construction d’un Afghanistan démocratique libéré du fanatisme taliban, sont le premier choc frontal mondial du nouveau siècle que doit affronter la communauté internationale.
Par toutes les dimensions qu’il met en forme, une fois la compassion et la solidarité avec les victimes affirmées et le crime condamné, par toutes les tentatives d’explication qu’il provoque, par la donne géopolitique qu’il bouleverse, le 11 septembre 2001 traverse tout un chacun, provocant ici trouble et doute, là désir de vengeance et haine, là encore hésitation, peur, incompréhension, simplification : “eaux mêlées” d’une pensée où s’entrechoquent, évidemment plus que dans une situation “normale”, passion et raison, sentiment et réflexion, certitude et interrogation.
Toutes les expressions de l’esprit sont respectables, pour autant qu’elles soient délivrées de toute attitude d’amalgame entre la victime et le coupable, entre fanatisme religieux et religion – ici islamisme et
Islam -, entre débat sur la politique des Etats-Unis et antiaméricanisme aux frontières, quelquefois du mépris des peuples, entre action destructrice peu ou prou justifiée par un prétendu “esprit du terrorisme” et action politique.
* * *
Les attentats du 11 septembre sont un crime contre les Etats-Unis, symbole, aux yeux et aux dires des agresseurs, d’un Occident – dont nous faisons partie – dépravé et honni, mais plus profondément, il s’agit surtout d’un crime contre l’idéal de démocratie, contre la pensée et la raison.
Comment ne pas l’affirmer quand la lutte idéologique, le débat public, la manifestation pacifique de ses idées, la confrontation politique – fut-elle musclée – sont récusées et délégitimées par la négation du principe de valeurs universelles, par l’affirmation qu’une sentence religieuse doit être la norme du droit et le référent de toute société, par le terrorisme comme justification de son action ?
Il peut paraître dérisoire face à ce que nous vivons depuis trois mois d’en appeler à la pensée et à la raison, alors que l’ambiance est à l’activisme, à la guerre, à la mort. Et pourtant, il n’est pas d’autre choix que de résister, penser et agir pour que la voix de la raison se fasse entendre, s’impose à tous les fanatismes et force aussi à regarder en face et à s’attaquer aux problèmes de ce temps qui sont un terreau favorable à l’expression de rancœur, de frustration et de haine à l’égard d’un monde occidental aveugle et sourd.
Pensons à la mondialisation ultra-libérale, au fossé Nord-Sud, au Moyen-Orient et à tant d’autres situations.
* * *
Toute l’histoire du Cercle Condorcet de Paris, toutes ses études, réflexions et publications témoignent de la volonté de participer à la création d’un monde qui ne soit pas réduit à un “choc de civilisations”, mais qui soit un monde où s’expriment les fondements de notre République : liberté, égalité, fraternité, auxquels il convient d’ajouter celui de laïcité, plus que jamais d’actualité. Laïcité, respectueuse de toutes les croyances et garante d’un monde solidaire ; laïcité, fondée sur la séparation du religieux et du politique, garante d’une société citoyenne protectrice de la liberté de pensée et d’action.
Alors, continuons le combat !