Changement climatique et crise énergétique

Le changement climatique lié à l’effet de serre d’origine anthropique est maintenant une réalité incontestable. Il se manifeste par le recul des glaciers, la fonte progressive de l’Arctique, des températures maxima plus élevées, une remontée vers le Nord des types de végétation, des ouragans plus violents, la disparition partielle de coraux…Compte tenu de l’inertie de la machine climatique Terre et en particulier du volant thermique des océans, ses effets devraient s’aggraver au cours des prochaines décennies, et ce même si le niveau d’émission des gaz à effet de serre pouvait être stabilisé aujourd’hui à sa valeur actuelle, ce qui n’est nullement le cas : il augmente de 3% par an.

Ses conséquences vont prendre un caractère dramatique: exacerbation des phénomènes climatiques extrêmes tels que canicule, sécheresse, inondation ; lente montée des eaux océaniques avec immersion de basses terres littorales ; désertifications locales avec déplacement de populations ; et peut-être dérèglement de la circulation thermohaline des océans… La plupart des hommes politiques de la planète en parlent plus ou moins, mais ne font rien ou presque, englués qu’ils sont dans dans le court terme des échéances électorales : les discussions sur le protocole de Kyoto ont débuté il y a dix ans et n’ont abouti qu’à des mesures minimales ne concernant que quelques pays et qui ne sont pas encore réellement appliquées. Ce problème se double d’un autre non moins important relatif à la gestion de l’énergie. La population mondiale va passer de 6,2 G habitants actuellement à 8,5 G en 2050. Le niveau de consommation énergétique augmente de son côté de 1,8% par an. Et surtout de nombreux pays connaissent un taux de croissance et de développement très rapide (Chine et Inde, entre autres) dont il faut se réjouir, mais qui va peser terriblement sur la balance énergétique. Les réserves d’énergie fossile (charbon, hydrocarbures et uranium) sont encore abondantes mais au rythme actuel de consommation seront pratiquement épuisées dans quelques décennies ou quelques siècles selon les cas. Confrontés comme nous le sommes à ces deux menaces, il est urgent de réagir. Rien de sérieux ne pourra être réalisé sans une action concertée au niveau mondial. Ce n’est pas une raison pour ne rien faire au niveau national au minimum, et européen si possible : un triptyque de projets communautaires sur l’énergie, l’environnement et la recherche permettrait de surcroît de relancer l’Union Européenne. De nombreux ouvrages de spécialistes et diverses commissions d’enquête (et en particulier celle organisée cette année par l’Office parlementaire des choix technologiques) ont donné lieu à des propositions sérieuses, pour l’instant toujours peu suivies d’effet. Nous avons réalisé une synthèse critique de ce vaste ensemble qu’il nous a semblé intéressant de vous communiquer pour information. ACTIONS A PREVOIR Généralités Informer et sensibiliser sérieusement les citoyens sur les crises potentielles et les enjeux. Nécessité d’une volonté politique ferme et soutenue au niveau national et international.Passer des paroles aux actes. Les actions sur l’environnement relèvent davantage du domaine législatif alors que celles sur l’énergie relèvent de projets de recherche et d’actions industrielles. Introduire des contraintes de développement durable et de protection de l’environnement à tous les niveaux et en particulier dans les règles de l’OMC (afin de ne pas disqualifier les nations vertueuses). Ediction de normes et d’incitations fiscales sur les économies d’énergie. Modifier profondément les mentalités, les pratiques sociales et nos règles de consommation, sans hésiter à prendre des mesures impopulaires. Informer très objectivement les Français encore hésitants sur les multiples avantages de l’énergie nucléaire. Lancer au niveau européen un plan global environnement/énergie/recherche. Normaliser les standards et interconnecter totalement les réseaux de distribution de l’énergie entre les membres de l’UE. Améliorer les rendements énergétiques dans tous les domaines (moteurs,chaudières, isolants, éclairage). Agriculture plus écologique (engrais, pesticides, lisiers, meilleure gestion de l’eau qui va devenir une denrée aussi rare que le pétrole). Repenser l’urbanisme pour éviter les trajets inutiles. Transports (24% des émissions mondiales de CO2 et 39% en France) Court terme : Taxation des gros véhicules (sauf certains utilitaires). Création d’une vignette carbone. Lutte contre les transports tous azimuts utilisés par de nombreuses entreprises pour optimiser les coûts de fabrication. Développer le transport maritime et ferroviaire (fret et ferroutage des camions) Etendre le réseau TGV et améliorer les interconnexions entre réseaux ferrés européens Développement de véhicules automobiles plus sobres et plus légers. Utilisation de véhicules hybrides-essence et développement de véhicules hybrides-diesel. Aouts de biocarburants de première génération (éthanol-diester : d’un intérêt limité). Recherches sur les batteries électriques plus compactes et plus économiques Développement du télétravail et des téléconférences NB. Peu de solutions pour le transport aérien très énergétivore et en pleine croissance (mise en place d’une taxe sur le kérosène). Long terme : Synthèse de carburants liquides à partir du charbon et du gaz naturel. Rcherches sur les biocarburants de deuxième génération (filière lignocellulosique à partir de résidus forestiers) utilisant toute la plante Véhicules tout électriques NB. L’hydrogène et la pile à combustible semblent de peu d’intérêt pour le transport. Bâtiment et secteur tertiaire (17% des émissions mondiales de CO2 et 26% en France) Court terme : Isolations généralisées avec matériaux nouveaux pour l’habitat : actuellement le chauffage consomme plus de 60% de l’énergie. Or on sait construire des immeubles qui consomment cinq fois fois moins d’énergie que les immeubles haussmaniens, avec panneaux isolants à changement de phase ou à particules absorbantes, vitrage renforcé, ventilation à double flux, éclairage par diodes ou fibres optiques, etc. Durcir la réglementation et introduire des incitations fiscales. Meilleure régulation des appareils de chauffage. Mise en place de compteurs intelligents pour la consommation d’électricité Utilisation du solaire thermique et recherches sur les capteurs voltaïques Utilisation de pompes à chaleur et de la géothermie basse et moyenne énergie là où c’est possible. Chauffage au bois (dégagement de CO2 compensé par la photosynthèse) Long terme : Extension du solaire voltaïque et des éoliennes sur les sites isolés Développement de la géothermie haute énergie en Alsace, Bretagne, Massif Central. Rénovation générale de l’habitat et surtout des grands ensembles en optimisant l’isolation, le chauffage et l’éclairage. Production d’énergie et industrie lourde (40% des émissions mondiales de CO2 et 27% en France) Court terme : Extension des centrales électriques à gaz à cycles combinés Développement du nucléaire de troisième génération (EPR) qui du fait des taxes sur le CO2 devient encore plus compétitif Utilisation améliorée du charbon : en cogénération et à lit fluidisé, centrales à vapeur supercritique Extension de l’hydroélectricité là où c’est possible. Recherches sur la production d’électricité par les courants marins et les vagues Recherches sur le nucléaire de quatrième génération (à neutrons rapides et à haute température) Améliorer le taux de récupération des gisements pétroliers (36% actuellement) Améliorer le traitement des déchets nucléaires et essais pilotes de séquestration souterraine du CO2 NB. L’intérêt des éoliennes est faible (production faible et très intermittente, coût élevé).
Long terme : Le pétrole sera progressivement réservé aux usages pour lesquels il est irremplaçable : transport aérien et automobile et pétrochimie Construction de centrales thermiques à charbon à haut rendement avec séquestration du CO2, si possible en couche géologique Expérimentations pilotes de quelques filières de réacteurs nucléaires de quatrième génération (produisant très peu de déchets, peu gourmands en uranium et dont les eaux de refroidissement permettent aussi de produire facilement de l’hydrogène)
NB. Le projet ITER sur la fusion nucléaire est intéressant mais son budget excessif risque d’assécher les recherches sur la fission. Agriculture et petite industrie (19% des émissions mondiales de CO2 et 8% en France (+ 10% équivalent CO2 provenant du méthane d’origine agricole) Economies d’énergie, isolation des bâtiments, lutte contre les pollutions, etc. Toutes les actions de R et D envisagées ci-dessus sont créatrices d’emplois et d’entreprises innovantes. ————————————————– Consommation française d’énergie primaire en 2005
Electronucléaire 37,3 % . Total de la consommation : 280 M.T équivalent pétrole Pétrole 33,4 % représentant 165 M.T équivalent pétrole réellement utiles, Gaz naturel 14,9 % compte tenu du rendement des installations, Charbon 4,9 % et dégageant 390 M.T de CO2 Electrohydraulique 4,5 % Bois 3,6 % Eolien 0,5 % Biocarburants 0,5 % Solaire 0,3 % Géothermie 0,05% 100 %
°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°° Annexe 1 : Les points forts de la France en matière énergétique Nous recensons ci-après les principaux domaines scientifiques et techniques dans lesquels la France pourrait mettre en valeur ses compétences, les développer et créer de entreprises innovantes et de l’emploi. – Première puissance nucléaire mondiale, la France dispose d’un capital de connaissances et d’expériences sur les réacteurs nucléaires et le traitement des déchets : le CEA, EDF et AREVA principalement constituent des centres d’excellence reconnus mondialement. Avec le développement inexorable de cette source d’énergie peu polluante et bon marché, il est évident que cette compétence doit être renforcée, ne serait-ce que pour éviter que nous soyons évincés par les américains et les japonais qui investissent massivement sur le sujet ou par les chinois et les indiens qui se lancent résolument dans la course. Avec le projet risqué ITER la France est bien placée pour préparer une éventuelle émergence des réacteurs à fusion. – Compte tenu de sa forte activité agricole, la France a un rôle à jouer en matière de biocarburants, non pas tellement pour produire de l’éthanol ou du bioester où nous ne sommes pas compétitifs par rapport aux producteurs des pays tropicaux, mais pour produire des biocarburants lignocellulosiques qui pourraient régénérer certaines forêts françaises avec un bilan nul sur le CO2 (photosyhthèse compensant combustion). La conversion de la matière organique en carburants est alors plus élaborée mais la France dispose des compétences adéquates en matière de génie chimique. – Bien que nous ne soyons pratiquement plus producteurs de charbon pour des raisons de prix de revient, nous pouvons aussi valoriser nos compétences en génie chimique pour améliorer la transformation et la combustion du charbon et le traitement des gaz brûlés. Nos entreprises d’ingénierie et de pétrochimie sont à même de concurrencer les allemands et les anglais sur certains créneaux tels que les centrales à lit fluidisé. Elles peuvent aussi s’impliquer dans la séquestration du CO2. Signalons aussi la maîtrise industrielle de la France avec Suez en matière de centrales électriques à gaz. Dans un domaine connexe, notre compétence en GNL (gaz naturel liquéfié) devra être valorisée (GdF, Technip) – L’industrie automobile française a toujours été innovante et doit tenir sa place dans l’amélioration des moteurs thermiques en cherchant à augmenter leur rendement énergétique (nous sommes encore loin de l’optimum thermodynamique) et limiter leurs rejets, et en développant des véhicules hybrides électrique-moteur diesel peu gourmands en énergie. – De moindre importance toutefois, les recherches sur les batteries électriques, les piles à combustible, les capteurs photovoltaïques, et la génération d’hydrogène peuvent être développées en s’appuyant entre autres sur les compétences du CEA, de EDF et de IFP. Dans ces domaines la concurrence avec l’étranger, le Japon en particulier, sera rude. – Citons pour mémoire les efforts importants qu’il convient de réaliser sur les matériaux nouveaux (isolants, composites structurés, panneaux réfléchissants modulables…) et les appareils de chauffage, de climatisation et d’éclairage pour réduire les pertes thermiques dans les bâtiments. Il y a place dans ce domaine pour de nombreuses PME innovantes. Les urbanistes et les architectes ont pleinement leur rôle à jouer pour concevoir et réaliser de nouveaux ensembles immobiliers adaptés aux besoins modernes et pour la rénovation de l’ancien. Annexe 2 : Sur les centrales à charbon Compte tenu de l’importance des réserves mondiales de charbon représentant deux siècles de consommation au rythme actuel, il n’est pas étonnant que celui-ci donne lieu à d’importants travaux pour améliorer son utilisation comme source d’énergie ou de chaleur. Les centrales élémentaires se contentent de brûler le charbon sur un lit fixe avec de l’air pour produire de la vapeur ou des gaz qui alimentent une turbine qui elle-même entraîne un alternateur électrique. En aval de la combustion les gaz brûlés sont traités sommairement avant d’être rejetés dans l’atmosphère. Les centrales à lit fluidisé brûlent le charbon préalablement pulvérisé dans un flux continu d’air plus ou moins enrichi en oxygène à une pression élevée. Du calcaire pulvérisé est ajouté au charbon pour fixer le SO2. Le rendement est meilleur mais le CO2 dégagé reste important. Arrivent sur le marché des centrales dites “supercritiques” fonctionnant à haute température (550°C) et haute pression (jusqu’à 300 atmosphères) conduisant à des rendements de combustion de 45% contre 30% pour les centrales ordinaires, et acceptant des combustibles divers (charbon, bois, déchets organiques). Dans les centrales à cycle combiné le charbon est brûlé pour obtenir du gaz de synthèse (CO et H2) qui actionne une turbine à gaz pour produire de l’électricité ; la chaleur du gaz est ensuite récupérée pour produire de la vapeur d’eau servant à alimenter une autre turbine. Le gaz de synthèse peut être transformé par le procédé Fischer-Tropsch en essence ou hydrogène, mais avec rejet de CO2. Quelle que soit le type de centrale, on ne peut éviter une production notable de CO2, environ deux fois plus par KWh produit qu’avec du gaz naturel . En remplaçant l’air par de l’oxygène on réduit dans des proportions importantes le volume des rejets. En toute hypothèse la captation du CO2 s’impose et elle coûtera cher. Peu de solutions sont pour l’instant opérationnelles. L’injection dans une nappe souterraine n’est pas évidente : il suffit de se rappeler les difficultés rencontrées par Gaz de F pour trouver en France des structures susceptibles de convenir pour le stockage souterrain de gaz. Annexe 3 : Sur les réacteurs nucléaires Par rapport aux actuels réacteurs à eau pressurisée (REP) actuellement en service en France, le réacteur EPR (European Pressurized water Reactor), dit de génération III, est basé sur le même principe mais avec une architecture simplifiée : il apporte une sécurité accrue, une économie d’exploitation, et surtout une meilleure utilisation du combustible, conduisant donc à moins de déchets. Il peut en particulier brûler une partie du plutonium produit comme déchet par les réacteurs actuels. Mais il faudra attendre les réacteurs de génération IV dont les applications industrielles ne devraient déboucher que vers 2035 pour assister à une véritable mutation. Plusieurs voies sont étudiées par un Forum international auquel participe activement la France : – porter la température de réaction de 500 à 1000°C et augmenter la pression en remplaçant l’eau (fluide caloporteur) par de l’hélium, pour améliorer le rendement de la conversion (very high temperature reactors) ; – conserver l’eau et la température actuelle mais opérer à très haute pression dans des conditions dites supercritiques (supercritical water-cooled reactors) ; – utiliser des neutrons rapides avec du sodium fondu ou de l’hélium comme fluide caloporteur avec dans ce cas la possibilité de valoriser tout l’uranium 238 et de brûler les stocks de déchets civils et militaires de plutonium (sodium-cooled fast reactors) – utiliser comme combustible un mélange uranium-thorium avec un sel fondu comme fluide de refroidissement (molten salt reactor), permettant de générer très peu de déchets (actinides). La France s’investit plus particulièrement dans les première et troisième voies. Annexe 4 : Sur les transports automobiles et les carburants alternatifs – Synthèse des données disponibles fin 2006 – 41 – Biocarburants à base de sucre (éthanol) L’éthanol est obtenu par fermentation de sucres provenant de l’amidon des cannes à sucre, betteraves, blés, maïs ou pommes de terre. En moyenne 1 ha de betteraves produit 6 T d’éthanol par an. Compte tenu de ce que l’énergie dégagée par sa combustion ne représente que 61 % de celle de la même masse d’essence, cette production équivaut à 3,5 T équivalent essence. Et 1 ha de blé produit 2,5 T d’éthanol ou 1,5 T équivalent essence. Mais l’énergie dépensée pour transformer les produits agricoles et produire l’éthanol représente 80 % environ de l’équivalent essence obtenu : le bilan énergétique global est donc assez faible. Le résultat n’est pas aussi mauvais dans le cas du Brésil, par exemple, car les rendements sont trois fois supérieurs avec la canne à sucre et l’économie est améliorée par un coût de main d’oeuvre bien moindre. La production actuelle du Brésil est de 20 MT d’éthanol. Il faut aussi tenir compte des pollutions par les engrais, par le CO2 et par les résidus dégagés pendant la transformation des produits agricoles, et des besoins en eau de l’agriculture. Par rapport à la chaîne qui va du pétrole à la combustion de l’essence ordinaire, celle qui va du champ de betteraves à la combustion de l’éthanol réduit toutefois la quantité de CO2 libérée de 48% . Ce gain tient compte du CO2 consommé pendant la photosynthèse de la plante. Il est de 80 % dans le cas de la canne à sucre. Autre avantage de l’éthanol, son indice d’octane est assez élevé : 120 contre 98 pour l’essence. Par contre, comme l’éthanol est corrosif, la chaîne de distribution sur les moteurs doit être modifiée, ce qui entraîne un surcoût non négligeable. Grâce à une réaction supplémentaire sur l’isobutène, l’éthanol peut être converti en ETBE, produit totalement compatible avec l’essence. Enfin, alors que l’Etat retire une énorme TIPP (70 % du prix des carburants) avec les essences courantes, il devrait renoncer à une partie de celle-ci pour que l’éthanol soit compétitif. Il ne le deviendra qu’avec un prix du brut supérieur à 100 $/bbl. Il présente donc un intérêt économique limité pour la France : en utilisant toutes les surfaces en jachère, il apporterait un petit complément à l’essence, dont il ne faut pas se priver. En fait il est surtout destiné à satisfaire le lobby des gros agriculteurs inquiets des prochaines réductions de la PAC. 42 – Biocarburants à base d’huile végétale (esters) Fabriquée à partir du colza, du tournesol, du palmier ou de l’arachide, cette huile obtenue par simple pression peut convenir pour les moteurs Diesel, à condition toutefois d’adapter ceux-ci (injecteurs HP, filtres). Le rendement est de 1 T équivalent pétrole par ha et par an, avec une dépense énergétique moindre que pour l’éthanol (environ 50 % du produit final). Alors que la filière éthanol s’adresse aux gros agriculteurs du nord de la France, la filière bioester s’adresse plutôt à ceux du sud. Déjà rentable au Brésil, elle pourrait le devenir bientôt en France si le prix du brut continue de monter. En toute hypothèse elle semble plus intéressante que la filière bioéthanol. Les esters méthyliques d’huiles végétales constituent une variante : il s’agit d’huiles obtenues après raffinage qui peuvent être directement mélangées jusqu’à 30 % avec le gas-oil pour les moteurs Diesel (on parle de diesters). Cette filière est intéressante pour les flottes captives (bus). Les émissions de CO2 sont réduites de 35% par rapport au diesel, ceci en tenant compte des phases de photosynthèse, raffinage et combustion. 43 – Carburants produits à partir de résidus forestiers Cette filière lignocellulosique devrait être beaucoup plus intéressante, non seulement pour éliminer des résidus végétaux dont on ne sait que faire aujourd’hui, mais aussi pour transformer le bois provenant entre autres des forêts méditerranéennes : dans ce cas la totalité de la plante peut être transformée, et pas seulement la graine ou la racine. Un réacteur à flux entraîné fonctionnnant à 1300°C permet de fabriquer un gaz de synthèse composé de CO et de H2 ; le carburant est ensuite obtenu par le procédé Fischer-Tropsch. Des recherches sont encore nécessaires pour mettre au point et optimiser cette filière. Une autre voie de synthèse basée sur la dégradation bactérienne des hydrates de carbone est à l’étude (dite hydrolyse enzymatique). L’intérêt de cette filière est que le bilan sur le CO2 est favorable puisque celui consommé pendant la photosynthèse des plantes compense celui dégagé pendant leur conversion. 44 – Motorisation électrique Elle présente de très nombreux avantages : *grande souplesse puisqu’un moteur électrique peut fonctionner sans démultiplication de l’arrêt jusqu’au régime maximum *réversibilité, avec recharge partielle pendant les phases de ralentissement * excellent rendement (65 % compte tenu du rendement de la batterie) *silence, souplesse et absence totale de pollution et de rejet. Elle présente aussi des inconvenients : *actuellement volume et poids excessifs des batteries (progrès possibles) *durée importante de recharge (même avec une pile au lithium la charge est limitée par l’intensité du courant dans la prise d’alimentation) *faible autonomie sans recharge *débit limité des batteries en cas d’effort prolongé. *incertitude sur la durée de vie des batteries soumises à un très grand nombre de cycles de charge et décharge. La motorisation électrique sera la solution d’avenir lorsque l’on disposera de batteries plus compactes à un coût raisonnable. Une voie encore au stade de la recherche semble intéressante : les batteries au lithium incorporant des nanoparticules. 45 – Motorisation hybride (thermique et électrique) Elle constitue la meilleure solution dans l’attente de tout électrique. Elle permet d’utiliser au mieux le moteur thermique puisque toutes les phases de décélération du véhicule servent à recharger la batterie qui alimente le moteur électrique dans les phases de démarrage ou d’effort important en soutien du moteur thermique, ou encore dans les phases de faible effort où ce dernier peut être arrêté. Le moteur électrique peut être situé entre le moteur thermique et la transmission (solution Honda), tournant alors au même régime que le moteur thermique, ou bien relié comme de son côté le moteur thermique à un répartiteur de puissance (solution Prius de Toyota). La gestion de cet ensemble ainsi que celle du freinage (freinage classique et récupération de l’énergie) relève d’une électronique embarquée complexe mais parfaitement opérationnelle et fiable. Avec ce système le véhicule passe automatiquement et graduellement du mode hybride au mode électrique pur. La consommation est réduite d’un tiers environ par rapport au seul moteur thermique et la pollution est fortement réduite. Le groupe PSA s’intéresse à un véhicule hybride avec moteur diesel qui consomme 20% de moins que ceux à essence et rejette donc encore moins de CO2. 46 – La pile à combustible Comme elle alimente un moteur électrique, on retrouve les avantages de ce dernier : motorisation relativement souple, silencieuse et non polluante. Mais les inconvénients sont très nombreux : *nécessité de recharger souvent de grosses bouteilles d’hydrogène (comprimé sous 700 bars de pression ou liquéfié à -253°C); celles-ci sont lourdes, volumineuses et entraînent de fortes contraintes de sécurité *quasi impossibilité de fournir une puissance instantanée élevée et de démarrer à froid, ce qui nécessite d’adjoindre au véhicule de grosses batteries *si on remplace H2 par du méthanol celui-ci doit être chauffé pour libérer H2, ce qui entraîne un rejet de CO2 et d’autres produits toxiques *coût très élevé du catalyseur en platine, actuellement redhibitoire *nécessité de nombreux accessoires : pompe d’injection d’air, circuit de refroidissement de la pile, échangeur…, rendant le système très encombrant *rendement thermique relativement faible (environ 50%). Par ailleurs la fabrication de H2 passe par des installations d’électrolyse à faible rendement alimentées par de l’électricité, au mieux d’origine nucléaire. Il faut ensuite le comprimer à plusieurs centaines de bars et le transporter, si bien qu’au final le rendement global est médiocre. Aujourd’hui cette voie piles à combustibles paraît sans issue pour le transport automobile : il faudrait réduire le coût de l’ensemble dans un rapport 100 pour le rendre compétitif, ce qui ne condamne nullement d’autres applications plus légères ni son émergence à très long terme. Il en est de même pour le moteur thermique alimenté directement par de l’hydrogène dont le coût de fabrication, stockage, transport et distribution sera toujours élevé. Il ne faut pas exclure les carburants liquides de synthèse qui peuvent être obtenus par le procédé Fischer-Tropsch (ou équivalent). Il consiste à brûler en présence d’eau et vers 350°C du charbon pulvérisé ou du gaz naturel ou encore des résidus végétaux pour obtenir CO et H2. Dans un deuxième temps ces gaz sont convertis en présence de catalyseurs en divers produits liquides. Bien que le procédé soit déjà opérationnel (les Allemands l’utilisaient pendant la deuxième guerre), celui-ci ne sera viable que si le CO2 dégagé pendant la conversion peut être séquestré. En conclusion en attendant l’arrivée de batteries nettement plus compactes et plus puissantes qui débloqueront le devenir des véhicules tout électriques, les solutions à retenir sont : poursuite de l’allégement et de l’amélioration des performances des moteurs thermiques (moindre consommation et moindre pollution) ; développement de véhicules hybrides dont la Prius est pour l’instant le meilleur exemple, et utilisation du GPL qui à puissance énergétique égale dégage 25% du moins de CO2 que l’essence. Annexe 5 : Sur les éoliennes Pour certaines personnes les éoliennes enlaidissent le paysage et sont bruyantes, peut-être. Mais les principales faiblesses des éoliennes se situent ailleurs : – Leur fonctionnement qui est limité à une plage de vents compris entre 5 et 25 m/s est nécessairement très intermittent et limité en pratique à environ 20% de la puissance installée. Elles doivent donc être associées à une source d’énergie complémentaire ou à des moyens de stockage du courant, ce qui pose divers problèmes de gestion. – Leur puissance est faible, de l’ordre de 1 à 3 MW. Ainsi l’Allemagne avec ses milliers d’éoliennes n’assure que 3% de sa production d’électricité. De plus elles sont fragiles. – Leur coût est très élevé (investissement au kWh plus du double des moyens classiques) et l’engouement de certaines municipalités pour ces installations relève d’une chasse aux subventions et aux taxes professionnelles. – Les éoliennes off-shore, plus hautes et plus puissantes, peuvent produire jusqu’à 8 MW, mais ont un coût encore plus élevé et posent de redoutables problèmes de corrosion et de tenue des structures. Dans son principe l’éolien n’est pas condamné mais n’est pas adapté à la météorologie française, sauf quelques petites applications spécifiques, en particulier pour les sites isolés. Quelques références *L’homme face au climat. Ouvrage collectif sous la direction de E.Bard. Editions O.Jacob et Collège de France. Fév 2006 *Changement climatique et transition énergétique. Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques. Rapport N°3197. 2006 *Les nouvelles technologies de l’énergie et la séquestration du CO2. Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques. Rapport n°2965. Mars 2006 *Vers la voiture sans pétrole. F. Roby. EDP Sciences. 2006 *Halte au changement climatique. B. Tissot. Editions O.Jacob. Avril 2003 *CLEFS. Revue du Commissariat à l’Energie Atomique. Numéro. 51 (Hiver 2005) et numéro 53 (Hiver 2006) René IFFLY

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