Jean Boussinesq et Robert Fossaert nous ont quittés.

Jean Boussinesq, décédé en ce début d’année, était membre du Cercle Condorcet de Paris depuis son origine. Ancien élève de l’Ecole Normale Supérieure (Ulm 1938), il était sociologue. Spécialiste reconnu des questions de laïcité, il avait, à la demande de la Ligue de l’Enseignement, rédigé un mémento juridique de la laïcité française (publié en Points Essais, au Seuil), ouvrage considéré comme une référence majeure. Il a travaillé notamment avec Emile Poulat, spécialiste du catholicisme et de la laïcité.
Membre de l’Union Rationaliste, il manifestait cependant une conception plutôt ouverte de la laïcité en ce sens qu’il s’en tenait à la lettre de la loi de 1905, instituant la liberté religieuse, de culte et de conscience. Il pensait de ce point de vue que la loi de 1905 pacifiait la société française dans ses rapports entre l’Etat et les religions, et qu’il n’était pas besoin de la modifier, notamment pour mieux intégrer l’Islam en France.
Au Cercle Condorcet, il donnait régulièrement des avis emprunts de bonhomie, de respect des convictions des uns et des autres, mais avec la juste rigueur de celui qui croit que la loi est une bonne gardienne des excès, des peurs irrationnelles..

Robert Fossaert est décédé le 26 février 2015. Il était l’un des membres fondateurs du Cercle Condorcet de Paris. Sa vie professionnelle a été riche. Economiste, il a participé à l’équipe de Claude Gruson qui a mis en place le service des études économiques du ministère des finances qui deviendra la Direction de la prévision. De cette expérience, il a tiré un livre, « L’avenir du Capitalisme ». Il a dirigé une collection « Société » aux éditions du Seuil, travaillé avec Claude Alphandéry dans une société financière immobilière, tout en oeuvrant à une actualisation de la pensée économique et sociale après Marx, pour un socialisme humain. Il a notamment publié une véritable somme en six volumes intitulée également « Société » dans laquelle il a proposé une vision globale, économique, sociale et politique des sociétés modernes, revisitant souvent avec bonheur les concepts de l’économie.

Sa vision n’a pas été seulement critique. Il a souhaité apporter une compréhension complète de nos sociétés et servir ainsi à mettre en place des politiques qui améliorent la vie des gens et la paix entre les nations. Profondément européen, il n’était pas moins critique de certaines orientations que sa construction prenait. Dans un dernier ouvrage, le Monde au XXIème siècle, il prônait la prise en compte des leçons de l’histoire pour mieux comprendre la force des évolutions en cours, de ce qui est positif, de ce qui est dangereux. Son ambition était toujours très grande : construire une pensée capable d’éclairer la compréhension du monde, plus encore dans les périodes de confusion et de pertes de repères, et d’agir pour le bien humain.

Au Cercle Condorcet de Paris, sa présence était toujours heureuse. Ses interventions, souvent critiques au premier abord, ouvraient sur des perspectives réjouissantes. Il nous arrivait même de les trouver trop optimistes… Homme du Nord, il parlait avec une faconde et une jouissance d’homme du Sud, parsemant ses paroles de traits d’humour lancés avec un plaisir évident, yeux plissés et bouche arrondie.

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