La fallacieuse tentation de la « sortie de l’Euro »

L’argument principal de ceux qui préconisent la « sortie de l’Euro » est le suivant : la Zone Euro ne peut fonctionner que si peuvent être opérés des transferts financiers importants en provenance des pays les plus riches… vers les pays les plus pauvres. C’est exact. Or, pensent-ils, les pays les plus riches – en premier lieu, l’Allemagne qui pratique pourtant un tel système dans sa propre fédération – refuseront de tels transferts (ce qui est posé comme un postulat). Si tel est le cas, ils en concluent que la Zone Euro n’est pas viable et ne peut conduire les pays qui la composent qu’à l’arrêt de la croissance et à d’autres désordres. En conséquence, si ces pays veulent retrouver la prospérité et le maintien d’une justice sociale, il leur faut impérativement sortir de l’Euro.

Tout ceci suppose qu’il est plus facile de sortir de la Zone Euro que d’en parachever le fonctionnement en la dotant des mécanismes d’une fédération bien conçue. Pourtant, la balance des inconvénients et des avantages entre les deux options n’est pas ce que voudraient faire croire les avocats de la « sortie de l’Euro ».

Tout d’abord, les inconvénients de la « sortie de l’Euro » sont multiples et beaucoup plus conséquents que ne l’affirment ceux-ci. Il y a, d’abord, les difficultés techniques auxquelles conduirait le retour à des monnaies nationales et ses conséquences sur l’économie qu’ils ne présentent que sous leurs aspects les plus favorables de dévaluations réussies. Ce qui serait loin d’être gagné. Mais, peut-être encore plus graves en seraient les conséquences géopolitiques. Il en résulterait, ipso facto, un grand affaiblissement de l’Europe, pour ne pas dire sa disparition en tant qu’entité sur la scène mondiale. L’Europe tendrait, alors, à ressembler à une « grande Suisse » – selon le terme employé par Hubert Védrine – dont les différentes composantes seraient ramenées à l’état de « cantons ». Avec une démographie déclinante, cet ensemble serait en constant rétrécissement et incapable de peser dans l’Histoire du monde, face aux monstres en expansion en Extrême Orient et en Afrique, voire à la Russie si celle-ci parvient à surmonter ses difficultés actuelles. L’Europe des « nationalismes » qui en résulterait ne serait plus qu’un « marigot » où se déchaîneraient de perpétuelles querelles intérieures, comme on le voit avec l’affaire des « migrants ». Et puis, ce serait la fin d’un grand rêve qui a résisté jusqu’ici à tant de manoeuvres d’obstruction et dont ne resterait que le souvenir.

Tout bien pesé, il paraît plus facile d’aller de l’avant, quelles qu’en soient les difficultés, que d’opérer le retour en arrière que nous susurrent les sirènes de la « sortie de l’Euro ».

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