Lettre n°21 : Revenir aux fondements de notre société: La « rupture » pour quoi faire ?

La mode est à la réforme, à la rupture, comme s’il s’agissait d’objectifs en soi. Et le style de notre Président, tout entier orienté vers l’action, ne fait qu’accentuer cette impression. Résultat : la réforme, pourtant nécessaire mais ne résultant pas d’un mûrissement suffisant, reflète plus les intérêts catégoriels que l’intérêt général. De plus, elle est trop souvent conçue comme un « copié-collé » de ce que font « les autres » (la « moyenne » de l’OCDE). Serions-nous condamnés à jouer les moutons de Panurge, après avoir abandonné notre « modèle social » ?
Préparer la refondation de la Gauche, disions-nous en juin. Mais avant de parler de réforme, encore faut-il réfléchir aux objectifs que l’on vise. Les finalités de notre société sont effectivement aujourd’hui à questionner. Est-ce la croissance, comme s’il suffisait de croître toujours plus pour être heureux ? Mais pour parvenir à quoi ? Dans quel état (pour nous et notre planète) ? Est-ce la concurrence, la compétitivité dont on tend à faire l’impératif suprême ? Faut-il apprendre à nos enfants que la condition principale de leur survie est de devenir meilleurs que les autres ?
Ne serait-il pas temps de repenser les valeurs de partage, de solidarité, d’égalité, ainsi que leurs bras opérationnels, les politiques des revenus et de la redistribution, qui ont longtemps constitué le socle de notre combat et qu’il est de bon ton de décrier aujourd’hui au nom de la suprématie de l’individu et de son mérite ? Ces politiques ont-elles encore un sens dans notre monde marqué par la globalisation ? Et quel sens ? Comment les mettre en pratique aujourd’hui ? Notre Président veut être le « Président du Pouvoir d’achat ». Certes, il y a là un réel besoin, alors que trop de nos concitoyens « n’y arrivent plus » et frisent la pauvreté. Mais n’aurait-il pas fallu penser à mieux répartir ce pouvoir d’achat avant de vouloir l’augmenter, surtout après avoir gaspillé les marges de manœuvre disponibles en octroyant un « paquet fiscal » aux plus nantis ?
Quand nous aurons redéfini les buts vers lesquels nous voulons aller, les objectifs que nous jugeons souhaitables pour notre société, il sera possible et urgent de définir les réformes à mener. Le Cercle Condorcet de Paris, pour sa part, entend apporter sa modeste contribution à cette tâche. Le texte de Maurice Bertrand, comme le compte-rendu de la « plénière » sur l’« économie solidaire et sociale » animée par Claude Alphandéry, que le lecteur trouvera ci-après, fixent des pistes pour ce faire.

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