Lettre n°17 : Une campagne présidentielle utile pour une année décisive ?

Après l’été, la France va entrer en pré-campagne présidentielle. Cette période de septembre 2006 à avril 2007 sera-t-elle utile pour notre pays ?
Pour cela, il faudra dépasser les crises récentes qui traduisent un malaise profond de la société française. Et il est souhaitable qu’un débat d’idées à la hauteur de celui qui a eu lieu sur l’Europe l’an passé prenne le dessus sur les sondages et sur les photos des magazines « people », mais aussi que les bonnes questions soient posées.

Les crises ne sont ni des poussées de fièvre ni des épiphénomènes ; elles traduisent un malaise profond de la société Française :
– absence de réponse claire face à la mondialisation et au chômage (la systématisation de la précarité et le mépris des jeunes ne sont pas des réponses adéquates) ;
– brouillage de la perspective Européenne (échec de la stratégie de Lisbonne, élargissement mal compris…
– dévalorisation du politique et de la fonction présidentielle (l’affaire Clearstream n’est que le paroxysme de la gestion clanique et clientéliste des partis politiques).

Parmi les principales questions de fond :

– Le passage au quinquennat et les difficultés marquant la fin de l’actuel mandat présidentiel nous interrogent sur le type de Président que nous voulons et, plus largement, sur les institutions qui doivent régir la France. Quel équilibre des pouvoirs ? Quels responsabilités et rôles respectifs pour le Président, le Gouvernement et le Parlement ? Quels liens accrus avec les institutions Européennes ? Faut-il décentraliser mieux tout en maintenant l’égalité républicaine ? Doit-on supprimer le Sénat et les départements ? Faut-il diminuer sensiblement le nombre des communes ?

– Qui imposera les thèmes de la campagne ? La Droite avec l’insécurité (comme en 2002) et l’immigration ? La Gauche avec le social, la culture et le développement durable ? Souhaitons que l’Europe ne soit pas, une fois de plus, le parent pauvre des prochains débats. Quelle vision globale l’emportera : libéralisme, communautarisme et atlantisme ou social-démocratie, valeurs républicaines et Europe ?

– La gauche saura-t-elle élaborer un projet convaincant faisant preuve de fermeté (droits et devoirs républicains, maintien de l’Etat de droit sur tout le territoire), mais offrant aussi des perspectives et redonnant l’espoir aux couches populaires et aux couches moyennes dont la situation s’est fortement dégradée depuis quatre ans ? Résoudre concrètement les problèmes d’une large majorité de Français en termes de sécurité, de logement, d’éducation, …est impératif. La réduction des inégalités en cassant la fragmentation et la ségrégation croissante de la société Française est une condition indispensable du succès de la Gauche lors de l’élection, mais aussi après dans la gestion du pays.

Les élections présidentielles de 2007 seront vraisemblablement les plus importantes pour la France depuis celles de 1981. Espérons que les débats menés dans les mois qui viennent seront à la hauteur des enjeux

Le Cercle Condorcet de Paris essaiera, avec ses modestes moyens, de faire entendre une voix citoyenne et républicaine dans ce contexte. La publication, sous le label de l’Interclubs, à laquelle il aura largement contribué, constitue une solide base de travail et de réflexion pour la Gauche, proposée aux différents candidats à la conduite de notre pays. Elle se veut une alternative aux propositions de mesures à court terme en l’absence de projets d’ensemble qui sont, trop souvent, au menu des « politiques ». Dans ce travail, le lecteur retrouvera le résultat de nos recherches passées sur le capitalisme, prolongées par la récente plénière avec Immanuel Wallerstein (cf : le compte-rendu de cette plénière et l’article de René Iffly). Dans un autre ordre d’idées, la réflexion sur les thèmes de la Ville, de la démocratie et du lien social menée dans le cadre du Groupe Espace public/ Espace privé progresse, alors qu’avance le projet de créer un autre chantier sur l’Education en liaison avec le travail de la Ligue de l’Enseignement sur l’Université.

De plus en plus, il s’avère que nous vivons une époque-charnière. Le capitalisme va-t-il survivre à ses excès et à ses dérives ? La mondialisation va-t-elle changer de forme et de tempo ? le développement durable va-t-il passer de l’état de mythe au stade opérationnel et sauver la planète ? Cette époque marque la fin des certitudes et ce que l’on a crû être la « fin de l’Histoire » (au demeurant, de quelle fin de l’Histoire pouvait-il s’agir ?)
L’avenir n’a sans doute jamais été aussi ouvert qu’aujourd’hui, mais simultanément, jamais aussi inquiétant.

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